Martin s’immobilisa. Il posa sa tasse de café sur la table du salon, passa la main dans ses cheveux pour entraîner vers l’arrière les mèches qui gênaient sa vue et se frotta les yeux encore embués par le sommeil. Malgré ses vingt-huit années d’existence, Martin entretenait cette habitude enfantine de porter un pyjama à carreau, pantalon et chemise, dans un style britannique qui ne faisait pas l’unanimité : dandy pour les unes, Mister Bean pour les autres.
Mal réveillé dans son pyjama anglais, Martin avait vu quelque chose par la fenêtre et s’était arrêté dans son élan qui le conduisait de la cuisine à la salle de bain où il s’apprêtait à conclure son rituel matinal. Il avait déjà ôté sa chemise, paré à se jeter sous la douche. Maintenant que sa vue était dégagée, il pouvait constater qu’une femme se trouvait dans l’appartement d’en face, derrière sa fenêtre, debout, de dos, devant un miroir où elle coiffait ses cheveux, entièrement nue. C’est cette dernière observation qui avait particulièrement retenu l’attention de Martin.
La distance les séparant n’était pas grande et Martin fut d’abord gêné à l’idée d’assister à ce spectacle indiscret. Il craignait que la demoiselle ne le prenne en flagrant délit de voyeurisme, mais il était comme hypnotisé par cette femme à la beauté exceptionnelle. Ses jambes fines et blanches remontaient comme un trait de crayon élancé vers deux fesses rondes et fermes. Il aurait donné tout ce qu’il possédait pour pouvoir les saisir et les embrasser avant qu’elles ne disparaissent à jamais de sa vue.
Peut-être que la distance et l’interdit accentuaient la sensation, mais il aurait juré qu’il n’en avait jamais contemplé d’aussi belles de toute sa vie.
Son vieux pantalon de pyjama à l’élastique usé par les années ne céda pas longtemps face à la tension exercée par le pénis de Martin qui s’était dressé dans une raideur absolu. Fasciné par les courbes oblongues de la demoiselle à la brosse, il ne remarqua pas que son bas de pyjama avait glissé sur ses cuisses, libérant son sexe figé qui pointait désormais dans la même direction que son regard.
Soudain, la jeune femme changea légèrement de position, penchant sa tête sur le côté pour coiffer ses longs cheveux noirs jusqu’aux pointes. Un bout de miroir jusqu’alors caché apparut à Martin, et au milieu de celui-ci, un sein. A l’image des fesses blanches merveilleusement galbées, ce sein était ferme et lourd, le téton pointé légèrement vers le ciel au milieu d’une aréole d’un rose clair sublime. Comme un fruit gorgé de soleil arrivé à maturité, cette poitrine saillante en pleine jeunesse était parfaitement équilibrée, grasse et solide, rigide et flottante… Comme il aurait aimé la saisir, la mordiller, la sucer, la lécher sans retenue.
Martin saisit son sexe et commença à se caresser, comme si c’était la seule chose à faire. Un homme se touchant en regardant une femme par la fenêtre… Il aurait été le premier à trouver la situation d’une perversité malsaine, mais la beauté de cette femme, la grâce de ses gestes, sa nudité pudique, la façon toute naturelle qu’elle avait de se tenir devant sa fenêtre… Martin ne voyait qu’un désir pur, qu’une envie presque chaste. Il ne ressentait pas d’attraction bestiale, aucune pulsion érotique lui donnant envie de se jeter sur elle et de la prendre sans ménagement. Il aimait cette distance entre eux, cette sensation d’observer une œuvre d’art à la beauté spectaculaire.
La jeune femme fit tomber la brosse à sa droite et dans un geste lent et ample, elle se pencha sur le côté comme une danseuse, sans plier les genoux, la jambe gauche s’élevant dans les airs tandis que le haut de son corps basculait vers la droite pour saisir l’objet. Il aperçut fugitivement son sexe, ou plutôt l’ombre de son sexe, entre ses jambes écartées en angle droit, comme un éclair violet. Peut-être avait-il vu quelques poils dessinés en ombre chinoise ? Ou peut-être les avait-il imaginés ? Un frisson de désir intense traversa son corps, manquant de le faire tomber. La jolie voisine retrouva sa position initiale et termina de se coiffer en tressant une natte avec application.
Une fois ses cheveux attachés, elle quitta son miroir et sortit de la pièce, laissant une fois de plus apparaître son sein gauche, de profil, et en une fraction de seconde infiniment trop courte pour Martin. Sa brusque disparition lui déchira le cœur. Il resta immobile devant sa fenêtre, son sexe toujours aussi dur dans sa main. Il ne put s’empêcher de murmurer « non, non, non… » de plus en plus fort. Devant la chambre désormais vide de la belle voisine, Martin suait à grosses gouttes, hésitant à crier de toutes ses forces pour qu’elle reparaisse.
Sa raison l’abandonnait, rongé par un désir aussi puissant que surréaliste. Le manque qu’il ressentait renforçait davantage son envie de la posséder, de se serrer contre son corps si pur et si parfait. De sa main libre, il tambourina contre la fenêtre, d’abord doucement puis de plus en plus violemment, jusqu’à risquer de la briser. Comme si elle avait entendu son appel, elle reparut, habillée cette fois d’une petite culotte, mais ses seins toujours libres.
Elle se planta devant la fenêtre, face à lui, en tournant la tête vers le miroir pour observer son dos. Martin pouvait ainsi la contempler pleinement, avec ses deux seins superbes pointant dans sa direction. Il ne respirait plus, il ne pensait plus, un flux irradiant le traversa et il y eut un silence inouï autour de lui. Seule l’image de cette femme, de ses seins, de ses longs cheveux noirs et de son corps galbé à la perfection continuaient d’exister. L’extase avait éliminé le reste du monde, reléguant l’humanité toute entière au second plan.
Il sortit lentement de sa torpeur orgasmique et constata à travers l’humidité de ses yeux embrumés que sa semence avait explosé contre la fenêtre, à hauteur de son sexe. Le temps de constater les conséquences de son plaisir, la belle voisine avait à nouveau disparu. Pour de bon, cette fois. Martin prit sa douche dans une somnolence étrange, apaisé, et les jambes encore flageolantes de plaisir. Il ferma les yeux pour que l’image de la femme reste gravée dans sa mémoire aussi nettement que possible. Il irait lui parler, il irait la voir. Il le savait, il n’avait pas le choix. Elle était en lui à jamais.
Fin
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