- Lire la première partie de l’histoire : L’inversion des valeurs – Partie 1
Mes doigts maintenaient ses fesses écartées aussi fort que je le pouvais. Mes ongles s’enfonçaient progressivement cherchant à agripper tout ce qui était vivant. En le voyant, je me souvenais de la première fois où je fus remplie, bouchée, enculée et je le regardais étouffant de malaise, piégé, enculé et passif. Tout était pareil et différent de quand c’était moi. Moi, c’était attendu, lui, c’était silencieusement consenti. Moi c’était mon intimité, lui, c’était tout ce qu’il lui restait de sa virile virginité. Il râlait dans des soupirs plus proches de la douleur que du plaisir. Il se devait de se détendre pour aimer ça ; il me l’avait tant de fois répété qu’il le savait.
Je sentis qu’il bandait encore plus fort. Il était pris au piège de la sexualité : il découvrait son corps et le plaisir dépassait encore ce qu’il était prêt à aimer. J’amplifiai la vibration, il reprenait le contrôle de sa respiration. Lorsqu’il voulut se redresser, il sentit cette chose dure dans son bassin, et il fit un bruit qui ressemblait à un gémissement de résignation. Il glissa une main dans le dos, comme pour vérifier, peut-être pour comprendre. Je pris cette main droite et exigeai la gauche ; puis, avec un de mes bas qui attendait sur le chevet, je lui attachai les poignets.
La tête dans l’oreiller et patient, il me sentit pencher vers lui pour lui murmurer à l’oreille que j’étais bel et bien en train de l’enculer. Je tenais sa verge dans une main alors que l’autre enfonçait à nouveau le vibreur Hugo qu’un instinct cherchait à sortir. « Tu aimes ? » ; phrase absurde compte tenu que son prépuce était agressivement étiré par mes soins. Comme toute réponse, il m’insulta. Une insulte simple, attendue, sans jeu de mot, sans relief, sans esprit. Assez pour me faire plaquer mon pubis contre le Hugo et pousser avec le bassin. Il me repoussa et je l’enfonçai à nouveau.
J’observai mon reflet dans le miroir aller et venir, massant sa prostate, vibrant son cul, le prenant comme une bourgeoise. Je ne sentais rien et je savais tout. Ça ne me branlait pas, je lui faisais mal pour lui faire plaisir. Peut-être allait-il jouir. En me disant cela, je m’aperçus que j’aurais aimé le faire à une femme : être un mec ou avoir une bite. Son dos brillant plongé dans le matelas, sa bouche qui ne parvenait plus à se fermer, son râle, mon vagin qui vibrait comme son colon : la vue était belle.
Les minutes passèrent, il ne débandait pas. Il restait dans cette tension douloureuse à effleurer le plaisir. J’étais maintenant à genoux sur mes talons, les lèvres détendues. Je regardais l’heure sur le réveil, pour constater que les minutes passaient bien. Ses fesses étaient rayées des boursouflures causées par mes ongles excités. Je lui détachai les poignets et il s’appuya sur les mains, cherchant quelques nouveaux mouvements des hanches. Je voulus me lever, faire quelques pas, regarder par la fenêtre, prendre du recul pour observer ce puceau qui n’arrivait pas à jouir. J’essayai de partager l’air de déception qu’avaient mes premiers copains quand j’avais mal, quand j’étais sèche, quand je ne voulais plus. Au lieu de ça je l’ai renversé sur le dos, attrapant les jambes pour les ouvrir.
Je l’avais regardé comme une fille, je voulais qu’il se voie lui-même telle une femme dressée se faisant attraper les chevilles pour se les mettre sur les épaules, son bassin soulevé. Mon clito frappa son Hugo qui dut changer pour une position plus profonde : il réagit comme si j’avais tapé son point G. Il commença à gémir plus fort, à redresser la tête, à serrer fort les yeux, à chercher à écarter ses fesses du bout des doigts. Mais quel était son plaisir ? « Quel est ton plaisir ? » lui chuchotai-je contre sa joue suante. « Celui de te sentir femme », me répondit-il en respirant avec euphorie. « Celui de te sentir forte » ajouta-t-il. Il gémissait, il râlait et son cul et mon con vibraient de concert.
Presque couchée sur lui, je voyais sur une moitié de visage transpirer ses nouvelles sensations, plus tout à fait étonné, encore un peu dans le tiraillement, pleinement dans la découverte et la jouissance. Redressée pour mémoriser ce tableau en panorama, je le branlai avec ma poignée la plus ferme ; je voulais étrangler son gland ; pendant que, plus doucement, je bougeais mon bassin contre lui. Le souffle saccadé et criard, il jouit. Son premier jet frappa le fond du condom dans un coup sourd ; le reste coula comme libéré.
Il était content. Il retira lui-même son jouet avant d’aller prendre une douche. Pour ma part, il était temps que je prenne un verre, puis un cigare, pendant qu’il me masserait les orteils. Après quelques minutes, il revint pour me lécher les seins goût orange, et enfin me masser les pieds. Il parlait peu, je n’écoutais pas. Je me sentis soudain femme.
À force de masser, il lui revint une érection. Je continuai à fumer mon cigare et terminai le Bas Armagnac. Il avait envie de reprendre sa place habituelle. D’un doigt il vérifia que j’étais suffisamment humide. Des dents il déchira un emballage de condom qu’il s’enfila et il me pénétra. Je le sentais, mais je ne voulais pas trop m’embarquer. J’avais déjà joui, il voulait s’assurer qu’il était toujours un homme, je voulais rester sur le plaisir de dominer. Il ne cessait de me regarder pendant qu’il butinait : il regardait attentivement mon sexe pénétré, il regardait attentivement mes seins vibrer à chaque coup, il me regardait attentivement mettre mon cigare en bouche pour lui jeter la fumée au visage. Puis progressivement, je vis une trace de panique dans son regard, il avait peur que ça ne vienne pas. Alors je commençai à râler, à gémir, à jouer avec mon périnée, à simuler plus de plaisir que de réel. Puis quelques encouragements eurent raison de son étincelle qui sembla lui piquer la colonne. Lorsqu’il rouvrit les yeux, ce fut pour me voir écraser mon purin dans le cendrier en regardant la fenêtre, puis tourner un regard souriant et lui souffler un dernier nuage de tabac en direction de ses fesses.
Le soleil apportait un éclairage gris sans ombre. Les Parisiens rentraient bruyamment de leur week-end en Normandie. Il est maintenant temps de se lever. Je rassemblai mes affaires dans un sac en tissu, un souvenir d’un hôtel luxueux. Dans la salle de bain, je pris encore une douche. En me rinçant les cheveux, je me disais que la quantité de calcaire dans l’eau devait sans doute me vieillir encore un peu. Je sortis les quelques échantillons de produits de soins, venus du même hôtel, oubliés dans ce sac. Je pris le temps d’un après-shampooing et d’un séchage doux. Puis je finis le lait pour le corps parfumé en m’en massant toute la peau, sans prêter attention à mon image dans le miroir, qui m’affichait dans des positions aussi peu sexy qu’une grue de montage. Enfin remise à neuf et parfumée, je dus me résigner à regagner des vêtements qui juraient les excès de la veille. J’imaginais que mon compagnon m’aurait invité à dîner, pourquoi pas des moules à volonté ? Au lieu de ça, il m’appela un Uber. Un simple baiser de pas-de-porte mettait une juste fin à notre presque histoire. Je rentrais prendre un thé, je n’avais pas faim.
J’écris ces quelques lignes. Il est maintenant très tard. Je relirai demain. Ce soir je dors en pyjama.
FIN
Article écrit par Bénédicte
Parisienne de 25 ans, de tendance bi, Bénédicte s’habille d’un minimum de tabou, pour vivre ses expériences amoureuses.
Journaliste lifestyle et sexo sur Ô Magazine, elle joue de cet espace privé pour vous raconter sa sexualité curieuse, intense et parfois dangereuse.
Philosophe excentrique, Bénédicte n’est pas qu’excitante, elle est un piège.