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Dîner de Con (5) – Le Commando

 

La décapotable de Thierry n’a que deux places. C’est pratique pour baiser quand on voyage à trois. Justine a retroussé sa robe d’été. Elle ne porte pas de petite culotte. Elle dévoile sans pudeur la fleur de son bas-ventre jusqu’à la ponctuation énigmatique de son nombril. Les attouchements de l’air sur ses cuisses mettent sa chair en feu. Elle est installée sur Bernard, qui lui élargit puissamment la vulve avec son pénis dressé comme un sémaphore.

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Le couple regarde, sans avoir l’air d’y toucher, les collines dorées de la campagne italienne, qui se chevauchent à perte de vue. Un esprit de mauvais goût y verrait des poitrines charnues et des corps lubriques renversés. Sur la départementale défoncée, les cahots de la route font tout le travail. Justine frétille à chaque nid de poule comme l’anguille lascive sur le harpon du pêcheur. Elle frémit de tout son corps comme la haie normande traversée par le vent capricieux ou comme Chloris caressée par Zéphir. De sa bouche entr’ouverte s’échappe, dans un râle, la vibration continue de son ventre. Le membre de son mari lui procure de multiples spasmes. Sa vulve contractée se dilate et rend triomphalement des litres de foutre.

Pour Bernard, ce n’est pas le même film. Il a la sensation étrange de baiser sans y être. Il pense à une autre femme. Les collines de l’Ombrie dessinent la silhouette pulpeuse de Corinne. Il ne l’a baisée qu’une seule fois, celle-là, mais il a gardé dans son pénis le souvenir impérissable de leur union mystique. Et il en redemande ! Il pelote, en attendant, les petits seins fermes de Justine et joue avec les bretelles de sa robe. Il recueille la sueur qui perle dans son dos avec sa langue. Il a le sexe bien campé dans son conduit lubrifié et éjacule à longs traits au plus profond de son intimité. Mais sa tête est ailleurs.

Justine, elle s’en branle. Elle s’agace le clitoris avec les doigts, en se mordant les lèvres. Elle est en feu. Elle rue. Elle gémit. Le désir qui la ronge est l’aiguillon d’une quête qui dépasse largement le pauvre Bernard. Et qui va même bien au-delà de la baise. Elle veut l’orgasme et la résurrection des corps, et défaille pieusement, en agrippant, chancelante, le haut du pare-brise de la décapotable.

Thierry conduit en regardant du coin de l’œil les ébats discrets de ce couple pervers. Il aime ça, le sexe en messe basse. Ça lui donne l’impression d’être cocu. Il bande comme un buffle. Justine, tout en se livrant sans mesure à Bernard, a libéré son sexe de son pantalon trop serré et le branle. Elle se penche pour le sucer. Thierry imprime une pression régulière sur cette tête d’aspirateur à foutre. Il décharge. Le bolide fait une embardée sur la voie de gauche. Thierry rétablit la trajectoire à grands coups de volant et traite Justine de salope. Celle-ci ôte complètement sa petite robe et la jette sur la voiture de derrière, provoquant un carambolage. Le bruit de la tôle froissée lui rappelle que le paradis se mérite à chaque seconde.

Elle passe sur le conducteur. Elle baise dos à la route de toute son âme, en jurant. Elle mordille l’oreille de Thierry, lui lèche le tympan, lui susurre des mots barbares, murmure son nom et le mêle à ses gémissements. Elle demande à être punie. Elle implore un orgasme. Elle lui dit qu’elle l’aime même si elle ne le pense pas. Elle lui dit qu’elle lui appartient et garde tout le plaisir pour elle seule. Elle hurle qu’elle aime aussi les femmes rien que pour le faire bander plus fort et ça marche. Elle vagit. Elle meurt. Elle veut qu’il meure avec elle. Le feu de son regard est un feu d’amour. Elle jouit dans un long tressaillement, en plaquant ses seins gonflés contre le visage de son partenaire. Thierry perd complément les pédales. Il accélère. Il empoigne le cul de la pécheresse et accompagne le mouvement bachique de ses hanches. Il jouit plusieurs fois dans son conduit resserré. Son autre main tient le sexe de Bernard et le branle. Le pare-brise de la voiture est couvert de sperme. Le pédalier est plein de foutre. Thierry baise Justine. Bernard tient le volant et éjacule à un rythme de défense antiaérienne. Le trio roule à tombeau ouvert. Les routiers klaxonnent. Certains font des photos et finissent dans le fossé.

Une heure plus tard, la Testarossa s’immobilise sur un terre-plein au bord de la route. Le talus offre une vue imprenable sur une villa en contrebas et permet d’observer sans être vu. Les trois complices s’allongent discrètement dans l’herbe. Chacun a pris sa paire de jumelles. Tous comprennent avec délice que leur quête s’achève enfin, dans la tiédeur de cet après-midi finissant.

Angela ou Corinne, car c’est elle, est sur la terrasse. Elle est reconnaissable, malgré le loup de carnaval qui dissimule le haut de son visage, à la perfection de sa cambrure, à la grâce de ses seins pneumatiques et à cette aura de luxure déraisonnable qui la nimbe et qui la place au-dessus de toutes les autres salopes de la Terre. Elle est entièrement nue et soutenue en l’air par une poignée d’hommes et de femmes qui la baisent. Deux hommes lui tiennent les jambes et lui mordillent les doigts de pieds en frottant leur pénis contre ses cuisses. Deux femmes lui tiennent les bras et maintiennent ses mains plaquées contre leur poitrine et leur sexe. Un homme tient sa tête renversée et met son membre gonflé dans sa bouche. Un autre homme est placé entre ses jambes. Il la pénètre avec tendresse. Angela frissonne à chaque coup de langue sur ses pieds nus. Elle palpe avec passion les poitrines généreuses et les vulves qui s’offrent à l’agilité de ses doigts libertins. Elle accueille, dans les profondeurs de sa gorge, l’énorme pénis qui l’étouffe à grands jets de sperme. Elle jouit sous les coups de reins de son partenaire. L’immensité de sa délectation la plonge dans un état cataleptique.

L’homme qui pénètre Angela délivre en même temps à une petite foule de spectateurs réunis en cercle autour de lui une leçon sur les deux buts principaux de l’existence, qui sont de son point de vue : baiser et se soustraire à l’impôt. La vie nous apprend que les extrêmes se touchent et que l’idéologie s’annule dans le capitalisme. On peut sauver l’homme du péché en accédant au paradis par le sexe. Le moment est venu de fixer les termes du retour de l’humanité à l’état primitif par de judicieux investissements, intérêts bien compris. L’élite de la finance doit l’exemple et montrera le chemin aux masses. Elle sera servie avant tout le monde et bénéficiera de tarifs avantageux. L’homme encourage ses amis à investir dans un grand complexe hôtelier dédié au salut de l’âme et au plaisir, près d’Assise. Il est également heureux de leur présenter sa femme, Tatiana, et les invite à venir caresser son corps de déesse. Ceux qui financeront l’hôtel pourront, plus tard, faire plus profondément connaissance avec elle.

Les invités se pressent nombreux autour de Tatiana, comme on se presse autour d’une relique. Ils touchent tout, ses parties les plus banales et ses endroits les plus intimes. Les uns caressent ses seins superbes. D’autres agacent son clitoris ou lui mettent un doigt dans l’anus. D’autres font traîner leur langue sur sa croupe. D’autres posent leur pénis sur son ventre. Des femmes se frottent contre ses hanches. Des hommes dessinent des hiéroglyphes sur ses fesses avec du sperme. Tous défaillent instantanément au contact de la peau chaleureuse de la sainte putain. Ceux qui ont communié regagnent paisiblement leur place dans le cercle. Ils se masturbent les uns les autres et se mettent des doigts ou en réclament, se palpent les seins, se flattent les pectoraux, offrent qui sa vulve, qui son pénis, qui son cul, qui sa bouche. Tatiana est étendue et en extase. Dans l’atmosphère rougeoyante du soleil déclinant, son corps pénétré et caressé de toutes parts, écartelé en étoile comme un reflet de la voûte céleste, lance des rayons d’une beauté inouïe, aux couleurs éblouissantes.

Bernard, Justine et Thierry observent frénétiquement la partouze du haut de leur talus. La seule vue d’Angela les bouleverse et les fait bander. L’herbe autour d’eux est noyée de foutre et de sperme. Bernard enfonce dans le sol son pénis dur comme le bois et ensemence la terre. Justine se frotte contre le gazon et rend des litres de foutre. Thierry est à genoux et se branle. La mâchoire serrée, le souffle court, chacun suit avec ses jumelles les contours majestueux et les courbes érotiques du corps nu d’Angela. Une saine jalousie les ronge. Elle exacerbe leur désir. Bernard n’y tient plus. Il passe sous Justine et la pénètre hardiment, le nez dans sa poitrine, en murmurant le nom de Corinne. Il la ceinture avec ses bras et la livre sans filet au mouvement accéléré de ses reins agiles. Thierry profite de ce moment de flottement, se place derrière elle et l’encule avec autorité. Il lui enfonce en profondeur son membre raidi dans l’anus, tout en observant la terrasse en contrebas avec ses jumelles. Il explose à coups répétés le croupion de la garce avec sa poutrelle, en s’imaginant pénétrer le cul accueillant d’Angela. Une vieille prière latine lui revient aux lèvres :

« Salve meretrix, salve lupa, salve proseda, vas devotionis ! O lupanar, speculum mundi ! », « Salut prostituée, salut sale pute, salut femme de mauvaise vie, vase de dévotion ! Ô bordel, miroir du monde ! »

Mais c’est Justine qui tire le meilleur parti de cette séquence hallucinante. La double pénétration la réduit à l’état de membrane. La proximité des deux pénis enfoncés jusqu’à la garde simultanément dans son cul et dans son con, alimente le brasier de son corps surmultiplié. Les coups de reins redoublés lui procurent un plaisir incommensurable et la livre à l’orgasme continue. Elle est ruisselante de sueur et de foutre. Le sperme reflue de ses orifices assaillis. Prise en étau entre les deux hommes, elle gémit et tremble comme une possédée. Elle voudrait tenir un sexe dans sa bouche tandis que, le nez dans ses jumelles, elle a le sentiment de baiser avec une femme. Le trio s’épuise dans un sabbat de tous les diables. Les heures passent. Bernard jouit dans Corinne, Thierry sodomise Angela, Justine, hors d’elle-même, rejoint mentalement la déesse de la terrasse dans les plus hautes sphères de la spiritualité saphique. Tous baisent la même femme et sombrent dans le coma en atteignant l’orgasme.

Quand ils reprennent connaissance. La nuit est tombée. La partouze continue sur la terrasse. Angela est passée entre les mains de plusieurs hommes et de plusieurs femmes. Elle offre son corps sublime aux rayons bleus de la lune. Il est temps d’en finir. Thierry est allé chercher une mystérieuse valise dans le coffre de sa voiture. Il en sort trois uniformes complets de policiers. Il a un plan.

À la fin de cette histoire, la patrouille de faux policiers sonne à la grille de la villa et débarque sur la terrasse en criant :

« Polizia ! Nessuno si muova ! Siete tutti in arresto sopratutto quella porca puttana scopata da tutti ! » « Police ! Personne ne bouge ! Vous êtes tous en état d’arrestation, surtout la putain de truie qui passe entre les mains de tout le monde ! »

Les partouzeurs s’évanouissent dans la nature en un clin d’œil. L’organisateur de la soirée s’approche d’un air embarrassé :

« Je suis le propriétaire de cette maison. Il y a erreur. Je m’appelle Jacques Stein et je suis psychologue ».

Thierry sort un pistolet et lui colle deux balles dans la tête. Un économiste poursuivi pour harcèlement et un vieillard libidineux et ancien ministre, qui n’ont pas eu le temps de s’enfuir avec les autres invités, prennent eux aussi deux balles. Le silence règne à présent sur la terrasse métamorphosée en cimetière. Il ne reste plus qu’Angela. Indifférente aux bruits et aux rivalités du monde, elle est étendue comme la Vénus de Cabanel et semble attendre qu’on la cueille. Son corps divin frémit de désir au plus profond de son intimité, comme si la partouze se poursuivait en elle et pour elle seule. Thierry s’approche, le sexe dressé, le feu aux tempes, les yeux débordants d’amour. Il va enfin reprendre sa femme. Il appelle timidement Angela. Justine sort son flingue et le bute. Bernard s’approche à son tour, la bite à la main, comme hypnotisé. Il est arrivé au bout de sa quête. Il répète le nom de Corinne. Il dit qu’il veut l’épouser et la supplie de lui accorder une nouvelle baise mystique. Justine le met en joue :

« Arrête tes conneries, Bernard ! Le XXe siècle, c’est fini. »

Bernard comprend qu’il est trahi. Il s’avance, suicidaire, prend deux balles et meurt en regardant les deux femmes s’étreindre sous la lune en se touchant les seins et en mêlant les langues et les A noirs.

On sonne. Bernard est tiré de sa rêverie. Il pose sur la table le Livre des visions et des instructions, se lève et ajuste son pantalon et sa cravate. Ce soir, Justine reçoit son patron à dîner. Elle a mis sa petite robe noire à cache cœur, qu’il trouve si élégante. Thierry vient avec sa femme, une Espagnole qui ne parle pas bien français. La soirée s’annonce d’un ennui mortel. Mais tu sais très bien comment ça va se passer…

Fin

Emmanuelle MArticle écrit par Emmanuelle M

Emmanuelle M. est née le 21 décembre 1977. Elle est experte en informatique.

Elle purge actuellement une peine de prison pour exhibitionnisme et écrit des récits intimes depuis sa cellule, pour passer le temps.